Construire une collection à la Villa Paloma
Le Conservateur doit faire en sorte que les acquisitions soient en harmonie avec la collection constituée depuis des années par la principauté : fonds des arts du spectacle de la Société des Bains de mer, collections de l’ancien Musée des Beaux-Arts, donations ou œuvres déposées à long terme par des mécènes privés, etc.. Il doit aussi la continuer en tenant compte des valeurs actuelles et des talents émergents.
Cette collection s’est constituée essentiellement au gré des expositions que le musée organise chaque année.
Continuateur mais aussi défricheur, le Conservateur doit rechercher des artistes qui apportent un nouveau regard sur le monde et "proposer une relecture de la forme et de la nature au travers de suggestions narratives et formelles visant à se la réapproprier afin de lui donner une nouvelle valeur symbolique ouvrant un large éventail de discussion sur la redéfinition du paysage tout en mettant en lumière le rapport entre art et science". (M.-C. Beaud)
Le NMNM présente une sélection d’œuvres acquises depuis dix ans, dans deux lieux, la Villa Paloma actuellement puis la Villa Sauber à partir du mois de mars.
Ces collections sont présentées dans une scénographie permettant de construire un récit de salle en salle.
La visite du premier étage commence par l’installation saisissante de Jan Fabre constituée d’une série de croix et d’épées en élytres de scarabées et de memento mori faites d’animaux empaillés, ainsi qu’une armure improbable et chevelue.
Plus loin, les grandes photos de Daniel Gustav Cramer de forêt très denses sont accrochées plus bas que coutume pour nous offrir des vues plongeantes où le regard se perd.
Étonnant aussi, le crocodile de Michel Blazy en matériaux périssables (tapioca, danette, jus de betteraves et coton) ou son squelette de reptile en biscuits de chien.
Une salle présente les très intéressantes photographies de Rebecca Horn, véritables sculptures corporelles de femmes à corne (de licorne) aux doigts prolongés de longues baguettes.
Hubert Duprat montre un ersatz de monolithe en cristaux de roche et paraffine ainsi qu’un étui de trichoptère, un petit insecte qui construit son enveloppe avec les matériaux de son habitat fixés par une soie qu’il secrète. En lui donnant de riches matières pour construire sa carapace, l’artiste transforme l’insecte en joaillier.
A voir et à entendre, l’anneau blanc de Brocolicci où sont propagées des ondes acoustiques. Instrument de musique ou sculpture ? Un équilibre précaire que recherche l’artiste entre réalité et fiction.
Jean-Pascal Flavien recherche dans les meubles et les formes architecturales en fonte d’aluminium un discours à construire avec des volumes et des meubles, nous proposant une maison construite comme un langage ou une parole.
Une grande salle investie par Steegman Angrané nous présente plusieurs rangées de rideaux en chaînes d’aluminium au sein desquels des passages aux formes différentes dessinent des lignes qui se recouvrent différemment selon le point de vue.
À contempler aussi, une très belles forme contournée comme retournée de Anish Kapoor, recouvertes de pigments bleus.
Et bien d’autres œuvres à découvrir...
L’ensemble présenté, s’il montre une grande diversité, obéit à une logique de collection qui doit embrasser le meilleur de la création de son temps pour le conserver et le livrer aux siècles futurs.
Suite en mars à la Villa Sauber.