On y est reçu avec gentillesse et naturel. Jusqu’au 5 mars, on y découvrira l’exposition « Le Théâtre de Papier d’Hélène » : des dessins en trois D, depuis la minuscule œuvre jusqu’au très grand format, réalisés avec des feutres à pointe fine. Poésie, grâce, conte de fée, humour. Avec de nombreuses références à la mythologie et de réminiscences d’un temps retrouvé chez Marcel Proust, auteur que l’artiste fréquente assidûment pour avoir déjà lu sept fois « À la recherche du temps perdu ».
Pièce maîtresse
Une chose est certaine : Hélène Depotte croit dur comme fer à la matière et au pouvoir de la main qui esquisse une réalité estompée, noir sur blanc. Elle brode aussi « La collection de Madame Huguette », des objets de curiosité racontant des histoires drôles et décalées. Le lien de parenté entre dessin et broderie, c’est la méditation que ces deux techniques permettent.
L’ambitieuse pièce maîtresse de cette exposition nous plonge dans les premiers temps de l’invention du septième art : une toile de 2,80 x 3 mètres représentant la devanture d’un cinéma devant lequel s’attardent quatorze personnages grandeur nature. Cette toile est dessinée à main levée. C’est une scène ordinaire du début du siècle dernier, quelque part à Washington, où est projeté le film « Mark of Zorro » avec Douglas Fairbanks. La mise en scène de la dessinatrice pour représenter cet instant de vie n’est pas dénuée de critique sociale : devant l’entrée du cinéma se trouve un homme de couleur auquel est refusée l’entrée, il nous regarde avec un sourire bienveillant. Entièrement exécuté à la pointe fine, ce tableau a représenté six mois de labeur, avec toutes les incertitudes d’une entreprise pour laquelle l’erreur est interdite et le repentir impossible.
Un temps retrouvé...
Lorsqu’Hélène s’exprime sur son travail elle utilise volontiers des qualificatifs directs comme elle. On n’hésite pas à la croire lorsqu’elle explique que cette toile a représenté pour elle « un Everest ». Native de Calais, son diplôme d’histoire de l’art en poche, elle a enseigné pendant trente ans avant de se tourner définitivement vers la carrière d’artiste. Un épanouissement complet qu’elle doit à ses parents : tenant une galerie d’art sa mère militait pour maintenir la culture dans une ville où celle-ci n’est pas franchement visible. Son père, était lui aussi un fervent lecteur de Proust.
Ernest Pignon Ernest, un ami de la famille, l’a encouragée à s’engager dans cette direction, lui faisant ouvrir une porte sur un monde où vivent des lapins blancs en redingote, qui courent en regardant affolés une montre à gousset en disant qu’ils sont en retard...